Pourquoi Netanyahou dénonce l’État profond ?

Israël : entre légitimité électorale et résistance institutionnelle

Depuis son retour au pouvoir en novembre 2022, Benjamin Netanyahou dirige un gouvernement formé uniquement de partis de droite et religieux, fort d’une majorité solide à la Knesset. Pourtant, ce gouvernement peine à exercer pleinement son autorité. En cause : une opposition institutionnelle puissante, que certains qualifient d’« État profond » israélien, dont l’action suscite un débat national de plus en plus intense.

Cette notion d’« État profond » – souvent qualifiée de théorie complotiste par les détracteurs du Premier ministre – désigne, selon ses partisans, une coalition informelle de hauts fonctionnaires, de magistrats, de membres influents du monde universitaire, médiatique et économique, qui entraverait volontairement l’action du gouvernement élu. Pour Netanyahou et ses soutiens, cette résistance n’est pas une chimère : elle serait une réalité enracinée dans les structures même de l’État, capable de bloquer les réformes politiques, sécuritaires ou judiciaires initiées par la majorité élue.

Un système judiciaire sans contre-pouvoirs ?

Le cœur de cette opposition institutionnelle se trouve dans le système judiciaire israélien, façonné depuis les années 1990 par l’ancien président de la Cour suprême, Aharon Barak. Ce dernier a instauré une jurisprudence qui confère à la Cour des pouvoirs d’intervention très étendus, lui permettant d’annuler des décisions politiques même sans base législative claire. Contrairement aux États-Unis, Israël ne dispose pas de constitution formelle ni d’équilibre rigide entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Ce déséquilibre a permis à la Cour suprême de devenir, selon certains analystes, une institution toute-puissante sans réel contrôle démocratique.

Le gouvernement Netanyahou a donc tenté d’introduire des réformes judiciaires modestes pour limiter l’influence de cette Cour, mais ces tentatives ont provoqué une mobilisation massive de l’opposition. Les manifestations de 2023, largement soutenues par les milieux libéraux, ont paralysé une partie du pays et suscité des divisions profondes au sein des forces armées, notamment chez les réservistes.

Une fracture démographique et culturelle

La crise institutionnelle actuelle reflète également une fracture démographique plus large. Alors que les élites israéliennes traditionnelles – souvent ashkénazes, laïques et ancrées à gauche – ont historiquement tenu les leviers de pouvoir, le pays est désormais majoritairement composé de Mizrahim (Juifs originaires du monde arabe) et de religieux, qui votent massivement à droite. Le gouvernement de Netanyahou incarne cette nouvelle réalité sociologique, que l’ancien establishment peine à accepter.

L’élite judiciaire et administrative, incapable de se renouveler au rythme du changement électoral, semble s’ériger en dernier bastion d’un pouvoir en déclin. Pour ses détracteurs, Netanyahou chercherait à briser les garde-fous de la démocratie ; pour ses partisans, il tente simplement de restaurer la souveraineté du vote populaire.

En temps de guerre, une légitimité mise à l’épreuve

La guerre contre le Hamas, déclenchée après les massacres du 7 octobre, a rendu ces tensions encore plus vives. Netanyahou souhaite nommer des responsables sécuritaires en qui il a confiance, mais il se heurte à des blocages institutionnels, notamment de la part de la procureure générale et de la Cour suprême. Pour ses soutiens, il est inconcevable qu’un chef de gouvernement soit empêché de diriger une guerre de manière efficace par une administration hostile ou paralysante.

L’idée selon laquelle ces blocages protègeraient la démocratie est fortement contestée. À leurs yeux, empêcher un gouvernement élu d’agir en s’appuyant sur des mécanismes juridiques opaques constitue une forme de subversion démocratique. Le parallèle avec les poursuites engagées contre Donald Trump aux États-Unis est souvent invoqué : dans les deux cas, les partisans des dirigeants conservateurs dénoncent une guerre judiciaire menée par des élites idéologiques cherchant à contourner le verdict des urnes.

La démocratie passe par les élections

Certes, certaines critiques contre Netanyahou sont légitimes, notamment concernant l’influence grandissante du secteur haredi (ultra-orthodoxe), dont une partie ne contribue ni à la défense nationale ni à l’économie. Mais la solution à ces déséquilibres ne réside pas dans les manœuvres institutionnelles, soulignent ses partisans, mais bien dans les urnes.

Le gouvernement en place, aussi critiqué soit-il, a été élu. C’est donc aux électeurs – et non aux juges ou aux hauts fonctionnaires – de décider s’il doit être reconduit ou remplacé. Une prochaine échéance électorale se profile à l’horizon 2026. D’ici là, le Premier ministre devrait pouvoir gouverner avec les moyens que lui donne la majorité parlementaire, sans être constamment freiné par une opposition institutionnelle refusant d’accepter les résultats du scrutin.

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3 Commentaires
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Nicole

Malheureusement ce sont des « élus » en Eretz aussi qui ne se contentent pas d’entraver les decisions mais vont jusqu’à trahir les secrets de l’armée dans les journaux.
C’est ce qu’on appelle l’ennemi de l’intérieur.
J’apprécie beaucoup Netanhyaou.
Mais il doit faire un effort pour le social, car ça c’est une bombe à retardement.

Franck DEBANNER

Le social est une dure, réalité, en Israël.

Mais renverser Bibi au profit des déjections de gauche, à emprisonner, c’est garantir la fin d’Israël. Et donc plus besoin de « social ». Il faut choisir.

Damran

C’est bien l’Etat Profond qui a emmerdé TRUMP durant son premier mandat.
Les wokistes et autres illuminés sont là pour empêcher le fonctionnement de la nation selon les décisions du président élu démocratiquement.
Il faut se débarrasser de la mainmise sur la démocratie par des « non élus« ….